Je suis sociologue, et comme beaucoup de mes pairs, j’ai pour mission de lire la société, d’en capter les mouvements visibles et souterrains. J’observe, j’écoute, je compare. Et depuis un moment, un mot s’impose dans mes analyses, dans mes conversations, dans mes réflexions : la trahison.
Elle n’est plus une exception. Elle est devenue norme. Et je ne parle pas ici d’un simple acte de reniement personnel, mais d’un phénomène généralisé qui s’installe dans nos mœurs comme une seconde peau.
Je la constate d’abord chez les anciens dignitaires du pouvoir d’hier. Ces figures, qui autrefois défendaient bec et ongles la continuité d’un système, au nom de valeurs humaines, professionnelles, patriotiques, sont aujourd’hui les premiers à se repositionner dans l’ordre nouveau. Sans transition. Sans remise en question. Ils avaient convaincu le peuple que le départ du chef serait une chute irréversible pour la Guinée. Et pourtant, les événements ont prouvé le contraire.
Plus troublant encore, ces mêmes visages tiennent aujourd’hui les mêmes discours que ceux qu’ils combattaient hier. Les rôles changent, mais les acteurs restent. Le décor bouge, mais le scénario semble écrit à l’encre de l’intérêt personnel.
Autour d’eux, une génération de leaders opportunistes émerge. Ils ne cherchent pas à servir, mais à s’imposer. Certains veulent prendre la place des autres, quitte à trahir les principes qu’ils affichaient la veille. Une autre catégorie, plus jeune, se contente de suivre le mouvement. Une jeunesse qui se laisse facilement séduire par les artifices du pouvoir, par les privilèges faciles. Une jeunesse qui, au lieu de porter haut ses idéaux, finit par trahir sa propre jeunesse.
La trahison ne s’arrête pas là. Elle se glisse dans nos foyers, dans nos mariages, dans nos services administratifs, jusqu’aux interactions les plus banales de la rue. Elle devient le reflet d’un mal-être collectif, le symptôme d’une société qui a perdu le sens de la fidélité — à soi-même, à l’autre, à la vérité.
Et pourtant, au milieu de ce panorama désolant, je garde foi en un homme. Le G.M.D. Lui, au moins, incarne une forme de cohérence rare. Il conçoit des projets, il les défend, il les réalise. Sans se dérober. Comme s’il avait compris que le destin de plusieurs reposait sur son engagement. Chez lui, je ne vois pas l’homme parfait, mais l’homme constant, et c’est déjà beaucoup.
Je n’écris pas pour juger, mais pour alerter. Pour poser une question simple, mais essentielle : que reste-t-il d’une société où tout le monde trahit ? Que devient une nation quand même ses promesses les plus sincères sont reniées ?
Il est temps que chacun, à son niveau, se demande s’il trahit ou s’il tient. Car si la trahison devient la règle, l’espérance, elle, devient la résistance.
ACS